« Le logiciel libre a contribué de façon décisive à la révolution numérique, par sa gratuité, sa qualité et le potentiel économique et industriel considérable qu'il représente », a déclaré ce matin le ministre chargé de l'Industrie, de l'Energie et de l'Economie Numérique, en ouverture de l'Open World Forum. La quatrième édition de l'événement consacré au monde de l'Open Source se tient à Paris jusqu'au samedi 24 septembre, à l'Eurosite Georges V. Au passage, Eric Besson a cité en exemple la large utilisation du navigateur web Firefox, la diffusion de l'OS mobile Android basé sur Linux ou, encore, le lecteur VLC, né du projet d'élèves ingénieurs de l'Ecole Centrale de Paris, « l'une des meilleures applications au monde pour diffuser des contenus multimédias ». Pour autant, le ministre juge utile d'insister sur la complémentarité entre logiciels libres et propriétaires, les uns obligeant les autres à s'améliorer constamment.

« Le logiciel libre facilite le transfert de technologie et la mise en oeuvre de standards ouverts et se diffuse de manière croissante. Le gouvernement l'a également identifié comme un axe stratégique », a-t-il rappelé en évoquant plusieurs projets dans lesquels l'Etat français investit, dans les domaines de la télévision interactive, de la portabilité entre plateformes de cloud, des logiciels embarqués et sur la mise à disposition prévue des données publiques via le portail Data.gouv.fr.

Investir sans demi-mesures

Profitant de la présence d'Eric Besson, c'est une véritable charge contre l'action des pouvoirs publics vis-à-vis du numérique qu'a lancé à sa suite Jean-Louis Missika, adjoint au maire de Paris, chargé de l'innovation, de la recherche et des universités. « 25% de la croissance européenne est liée au numérique et c'est encore plus vrai pour la région parisienne. Dans une période de crise aigüe, les investissements doivent se faire sans demi-mesures. On ne peut pas prétendre à un développement d'avenir et supprimer les aides fiscales qui aident les PME, ce que la loi de finances 2011 a mis à mal », a-t-il lancé. Il considère que l'on ne peut pas mettre en place un plan sur plusieurs années et changer les règles du jeu à mi-parcours. « On ne peut pas encourager ce secteur et le traiter comme la poule aux oeufs d'or », a-t-il poursuivi en énumérant les taxes qui ont frappé l'industrie du numérique au rythme d'une nouvelle tous les ans depuis 2007. « Il faut un meilleur accès aux marchés publics pour les PME, ce que nous essayons de faire dans une certaine mesure à Paris. » Pour lui, la France ne fait pas assez pour soutenir l'Open Source. « L'administration devrait avoir obligation pour communiquer de n'utiliser que des standards ouverts ». Jean-Louis Missika a aussi vigoureusement défendu la neutralité d'Internet. « Un Internet non neutre, cela a déjà été testé à grande échelle en France avec le Minitel, on a vu les limites du modèle. Hiérarchiser les conditions d'accès à Internet, c'est remettre en cause la neutralité. L'idée de revenir sur la neutralité n'est pas envisageable. » Il fustige un éventuel système de péage.

Assurer les emplois de demain

Très loquace, l'adjoint au maire de Paris a aussi pointé qu'on ne peut pas souligner le rôle bénéfique d'Internet comme appui au Printemps arabe et voter en France des lois qui portent atteinte aux libertés fondamentales comme peut le faire la Loppsi 2.
« Enfin, sur bien des sujets, la gouvernance est efficace quand elle se place au plus près des territoires », a ensuite abordé Jean-Louis Missika. Prêchant dès lors pour sa paroisse, il a rappelé les actions de la Ville de Paris. Le programme Emergence(s), par exemple, qui accorde des bourses de financement à de jeunes chercheurs pour des projets innovants, le soutien apporté aux pôles de compétitivité locaux et aux nombreux incubateurs, parfois adossé à des organismes de recherche, ainsi que l'association avec Oseo pour soutenir des entreprises en phase d'amorçage. Enfin, sur l'Open Data et la diffusion des données publiques, ce n'est, pour Paris, « pas un projet mais une réalité », selon lui. En conclusion, il a reconnu que certains des sentiers à emprunter étaient complexes, « mais c'est à ce prix que nous assurerons les emplois de demain et la vitalité de la Ville de Paris ». Une intervention largement applaudie par le public de l'Open World Forum, gagné plus particulièrement à certains de ses arguments.

Un peu plus tard dans la matinée, Nigel Shadbolt, membre du conseil de transparence du secteur public britannique, investi dans l'aventure Open Data Outre-Manche, est venu expliquer quels enseignements le gouvernement du Royaume-Uni avait tiré de son projet de mise à disposition des données publiques (data.gov.uk).

Illustration : Eric Besson, ministre chargé de l'Economie Numérique (à gauche) ; Jean-Louis Missika, adjoint au Maire de Paris, chargé de l'innovation, (à droite). Crédit : M.G.