A l'heure où le monde informatique piaffe d'impatience en attendant une probable vente de Sun à IBM, c'est un autre dinosaure du monde Unix qui disparaît. Achevé par la crise, SGI a été mis en faillite hier, 1er avril. Dans la foulée, le bien nommé Rackable Systems a offert de l'acheter pour 49 petits millions de dollars. SGI avait déjà été placé sous le chapitre 11, version américaine de la faillite, en mai 2006, mais s'en était alors sorti. Cette fois, la situation économique a eu raison du spécialiste du calcul haute performance avec affichage graphique 3D haut de gamme, déjà sur une courbe dangereusement descendante depuis des années. Le CA 2008 de SGI, un exercice fiscal clos en juin dernier, avait chuté de 24%. La perte opérationnelle se montait alors à 127,2 M$ (elle était de plus de 100 M$ en 2007). Pour son deuxième trimestre 2009, SGI avait encore perdu 49,2 M$. Le constructeur s'est perdu en chemin. Silicon Graphics, de son nom complet, est né en 1982, à l'heure bénie où les génies de l'informatique bâtissaient le futur tranquillement installés dans des garages. Il a petit à petit perfectionné ses solutions serveurs, OS et logiciels à destination de clients exigeants dans des industries très spécifiques comme le film ou le pétrole. Ces secteurs ont des besoins très pointus, à la fois en calcul et en affichage 3D de très haute qualité. L'inventeur d'OpenGL Puis, en 1992, SGI s'est distingué avec OpenGL. Cette API d'affichage graphique 3D est devenue un standard et reste au coeur de la plupart des applicatifs de ce type aujourd'hui. Pour preuve, les travaux engagés il y a quelques jours autour d'un standard pour le web 3D s'inspirent d'OpenGL. Par la suite, à la fin des années 90, SGI a pris la décision d'abandonner ses machines à base de processeurs Mips (processeurs de type Risc, par opposition aux architectures x86) qui tournaient sous son propre Unix, Irix. L'entreprise entreprend alors une difficile transition vers le couple Intel/Windows NT, nettement moins différenciateur. On peut imaginer que l'acquisition de SGI par Rackable Systems, spécialiste du datacenter (serveur et stockage en rack), devrait rassurer les clients de SGI. Les deux constructeurs ont des gammes tout à fait complémentaires. Comme le déclare Mark Barrenechea, président et CEO de Rackable Systems, dans le communiqué de l'annonce : "Ensemble, nous pensons que nous pouvons devenir une entité bien plus forte avec des produits et des gens formidables qui offriront une réponse plus efficace à au sein de nos marchés respectifs et de façon transversale. » La transaction annoncée hier doit encore être validée par la Bankruptcy Court américaine, et devrait être confirmée d'ici 60 jours. Gageons toutefois que la disparition de SGI, présent sur le marché depuis 27 ans, laissera à beaucoup un léger goût de nostalgie.