De la maîtrise des systèmes embarqués à celle des dispositifs connectés, sur le point d'envahir notre espace et notre quotidien, le pas est vite franchi pour Altran. La société de conseil en innovation et ingénierie, qui accompagne les industriels dans la création de produits, vient de mettre le cap sur ces équipements connectés que l'on qualifie couramment (même si l'on peut le regretter) de systèmes « intelligents ». Au sein de ses équipes (20 000 collaborateurs dans le monde), elle a constitué une organisation de 3 000 experts répartis entre 13 pays autour de six domaines : l'ingénierie des systèmes, l'ingénierie logicielle, l'électronique, la sûreté, la sécurité et la connectivité. L'enjeu : jouer un rôle d'intégrateur dans ce monde de dispositifs fonctionnant en temps réel, exposait ce matin Pascal Brier, vice-président exécutif, responsable du développement business chez Altran.

Dans ce domaine en très forte évolution, « on est à l'aube de ce qui va se passer », rappelait à sa suite Alain Petrissans, vice-président associé du cabinet d'analyse IDC France. « Il y a en ce moment beaucoup de recherche et de projets menés pour toucher tous les consommateurs et répondre à des besoins sociétaux liés à la santé, à l'énergie, aux loisirs et aux problèmes de transport. » En 2020, il y aura 31 milliards d'équipements connectés capables de réagir en fonction des données qu'ils reçoivent, près de 1,3 trilliard de capteurs et jusqu'à 450 milliards d'interactions par jour. « Nous sommes vraiment sur un marché qui croît très vite », a souligné Alain Pétrissans. « Comment ces dispositifs vont-ils se comporter une fois connectés entre eux, vont-il réagir comme on le souhaite », s'interroge l'analyste d'IDC qui travaille sur le sujet depuis deux ans et demi. L'autre grande question concerne la prolifération des données qui induit des problèmes non résolus sur la sécurité et la confidentialité. « Là non plus, nous ne savons pas où l'on va ». Le 3ème grand enjeu technologique est celui de l'interface. « Il n'y a rien de plus perfectible qu'un être humain ». Pour réduire le risque d'erreur de manipulation, par exemple dans le domaine de la santé, il faudra simuler le comportement de l'opérateur avant de mettre le dispositif connecté sur le marché.

Coopération et fertilisation cross-domaine

En 2015, c'est-à-dire demain, le marché des équipements connectés sera supérieur au marché de l'informatique traditionnelle. « Les questions que cela pose à l'ensemble des acteurs de la chaîne de valeur sont principalement la coopération et la fertilisation cross-domaine », explique Alain Pétrissans en citant comme exemple les acteurs de la voiture connectée qui vont travailler avec les opérateurs de télécommunication. « Il y a de plus en plus de dialogue entre les sociétés pour pouvoir résoudre ensemble les problèmes, notamment sur l'interface homme-machine ». Une coopération imposée notamment par l'équation économique. Autant de domaines où Altran a un rôle à jouer.

Le 2ème problème, c'est que les systèmes communicants vont emporter beaucoup d'acteurs dans leur chaîne de valeur et qu'il y aura une bataille pour accéder aux consommateurs. Au passage, l'analyste d'IDC évoque les cycles de vie des différents produits et, de façon associée, les questions de standardisation et d'anticipation. « Il va aussi falloir partager les données et savoir déterminer qui prendra la responsabilité du bon fonctionnement des systèmes face aux clients ». Le dernier point fondamental concerne le modèle économique qui peut constituer un frein plus important que les problèmes techniques.

Des exemples sur la voiture connectée et le contrôle aérien

Dans ce monde qui naît, caractérisé par la fragmentation de ses technologies, Altran entend bien jouer le rôle d'intégrateur apportant l'expertise verticale sur les secteurs industriels où il s'est forgé une spécialisation au cours des années, en particulier l'automobile, l'aéronautique, la défense, les télécoms et les médias, l'énergie. Mais la société française compte aussi intervenir dans le domaine de la santé (équipements médicaux et télémédecine) et dans le recueil des big data. « Il est indispensable de connaître en profondeur chacun de ces secteurs », insistait ce matin Keith Williams, directeur exécutif d'Intelligent Systems, l'organisation spécifiquement mise en place par Altran pour suivre ce type de projets. Cette organisation est gérée à l'échelle mondiale. « Nous avons recruté un certain nombre de directeurs techniques et développé une méthodologie », a notamment indiqué Keith Williams. Et certaines entités ont leur spécialisation, comme Sophia Antipolis qui a développé une expertise sur l'interface homme-machine (IHM). L'organisation d'Altran sur les systèmes connectés interviendra en particulier sur les aspects de simulation avec l'objectif de pouvoir « effectuer des tests à moindre coût ».

Ce matin, Altran a présenté deux types d'applications assorties de démonstrations. La première, très concrète, a porté sur la communication entre un PC de salon et une voiture, avec transfert de musiques et de films de l'un à l'autre et lecture de tweets par « text to speech » au volant du véhicule. Dans le domaine de l'automobile, Altran va proposer une plateforme basée sur des standards Open Source, l'Open Connected Car, qui permettra l'intégration des applications et technologies des différents intervenants. La deuxième démonstration présentée ce matin concernait le domaine du contrôle aérien. Avec le capteur Kinect, de Microsoft, et une tablette iPad, Altran montrait comment contrôler l'interface du système de contrôle aérien par la voix et le geste et échanger des informations sur les appareils en vol.

Altran : application de contrôle aérien utilisant des systèmes connectés
Un exemple d'application possible dans le domaine du contrôle aérien montré ce matin dans les locaux parisiens d'Altran. A droit, on aperçoit le capteur Kinect. (crédit : LMI)