Malgré toutes les bonnes volontés et moulinets de communication possibles, mois après mois, année après année, la réalité des chiffres ne manque pas de mettre en lumière le fossé qui existe entre le rêve d'une neutralité (voire d'une empreinte carbone négative) et la réalité (actuelle) des chiffres. Dernier exemple en date, le bilan carbone de Microsoft qui fait ressortir pour 2023 un bond de 29,1 % des émissions de carbone par rapport à 2022. La faute à qui ? En grande partie à ses émissions indirectes du scope 3 (intégrant les investissements, les déchets, le transport) qui représente plus de 96 % de ses émissions totales. Elles proviennent en grande partie de la construction et de l'approvisionnement de datacenters pour répondre à la demande des clients en matière de services cloud, mais aussi anticiper les besoins en IA. Cette dernière est particulièrement énergivore.

Pourtant la firme de Redmond veut croire en des objectifs répétés aussi depuis plusieurs années par sa filiale française : « Cette année, des technologies comme l'IA ont renouvelé la promesse du rôle que l'innovation peut jouer dans l'accélération du progrès. De l'amélioration des mesures à l'augmentation de l'efficacité des datacenters et à l'amélioration du transport de l'énergie, la technologie peut être un puissant accélérateur du rythme et de l'échelle dont le monde a besoin pour atteindre la neutralité carbone », explique Microsoft dans un rapport plutôt bien détaillé et dont le travail mérite d'être salué.

Utiliser du béton, de l'acier, des carburants et des puces plus durables

Dans le détail, le groupe explique qu'en 2023, ses émissions du scope 1 et 2 ont diminué de 6,3 % par rapport à la base de référence de 2020. Un bon résultat largement entaché par ses émissions indirectes (scope 3) qui ont augmenté de 30,9 %. Au total, sur l'ensemble des scope 1 à 3, les émissions de Microsoft ont donc monté de 29,1 % par rapport à 2022. « L'élévation de nos émissions du scope 3 provient principalement de la construction de nouveaux datacenters et du carbone incorporé associé dans les matériaux de construction, ainsi que des composants matériels tels que semi-conducteurs, les serveurs et les racks », justifie Microsoft. « Nos défis sont en partie propres à notre position en tant que fournisseur de cloud qui étend ses datacenters. Mais plus encore, nous reflétons les défis auxquels le monde entier doit faire face pour développer et utiliser un béton, de l'acier, des carburants et des puces plus écologiques ».

Pour 2023, Microsoft affiche dans son rapport plusieurs indicateurs montrant que certains efforts faits par le groupe finissent quand même par payer. Par exemple sa consommation totale d'électricité renouvelable sur cette période a été de 23,6 millions de MWh ce qui d'après ses calculs suffirait à alimenter Paris pendant environ deux ans. La réalimentation en eau sous contrat depuis 2020 du groupe s'élèverait quant à elle 61,7 millions de m3 (l'équivalent de plus de 24 000 piscines olympiques), et sa quantité totale de déchets solides détournés des décharges et des incinérateurs atteindrait 18 537 tonnes de m3, soit l'équivalent du poids de plus de 45 avions de ligne. « 15 849 acres ont été désignés comme étant protégés de façon permanente. Nous avons dépassé de plus de 40 % notre objectif par rapport à notre ambition de protection de 11 000 terrains. Dans le cadre du  Datacenter Community Environmental Sustainability program, nous répondons aux besoins locaux dans les communautés qui accueillent les datacenters de Microsoft et où nos employés vivent et travaillent », avance la firme qui préfère voir sans doute le verre à moitié plein.

Pour autant l'affaire est loin d'être dans le sac car le rapport indique aussi que la consommation d'eau de l'entreprise a en fait augmenté conformément à la croissance de ses activités passant d'un peu moins de 6,4 millions de m3 en 2022 à un peu plus de 7,8 en 2023... sachant que le chiffre de 2022 était lui-même en hausse de 34 % par rapport à 2021. Microsoft indique qu'il compte bien éliminer tous les déchets liés à la construction et à l'exploitation de ses infrastructures d'ici à 2030, et que 90 % de ses serveurs et de l'ensemble du matériel informatique seront réutilisés et recyclés d'ici à 2025. A suivre.