A posteriori, l'explication officielle fournie pour expliquer le départ du PDG de HP suscite quelques interrogations. La démission de Mark Hurd a été annoncée après la fermeture des marchés vendredi dernier par le Conseil d'administration du groupe, justifiée par l'existence d'une plainte pour harcèlement sexuel et par des notes de frais improprement libellées et des dépenses injustifiées. La société n'avait-elle pas d'autres options que cette annonce brutale qui a attiré sur elle une attention peu flatteuse. A moins, relèvent nos confrères de Computerworld, que les problèmes rencontrés par Mark Hurd n'aient constitué pour ses administrateurs une opportunité de renouvellement à saisir.

Il est possible que le conseil d'administration ait souhaité opérer un changement dans la direction du groupe. A la tête de HP, Mark Hurd a dû surmonter la récession et relancer la croissance. Il a supprimé des milliers de postes et contraint les collaborateurs de l'entreprise à réduire leur salaire dans tous les secteurs. Le groupe a aussi revu drastiquement son fonctionnement opérationnel, faisant passer le nombre de ses datacenters de 85 à 6. Ce fut une tâche rude et éprouvante et la société veut peut-être un nouveau visage pour diriger le groupe.

Sous sa direction, HP avait racheté EDS, 3Com, Palm...

Mark Hurd était un opérationnel. Il se concentrait sur les investissements, les livrables et veillait à maintenir la confiance des investisseurs. Il ne parlait pas souvent de sa vision, il se contentait de la mettre en oeuvre. Sous sa direction, HP a racheté EDS pour 13,9 milliards de dollars, 3Com pour 2,7 milliards de dollars et Palm pour 1,2 milliard de dollars. De même qu'une série de solides éditeurs de logiciels parmi lesquels Opsware, pour 1,6 milliard de dollars. Ses efforts pour créer une entreprise aussi concurrentielle dans les services que dans la fourniture de solutions complètes pour les entreprises a incontestablement porté ses fruits.

Mais il est néanmoins possible que le conseil d'administration se soit demandé si Mark Hurd était la bonne personne pour procéder à l'intégration d'acquisitions telles que 3Com ou Palm, ou encore pour rester dans la course sur le marché de la mobilité pris d'assaut par Android, ou encore sur celui du cloud. Le groupe a besoin d'un innovateur.

L'influence de Marc Andreessen, icône de la "Valley"

L'intérêt de HP pour un profil qui s'approcherait davantage de celui de Steve Jobs a filtré vendredi dernier dans les propos de Marc Andreessen, l'un des membres du conseil d'administration. Celui qui fut en son temps co-fondateur de Netscape (l'un des acteurs phares des navigateurs Web) a aussi apporté à HP quelques technologies clés dans le domaine des serveurs et datacenters, avec la revente en 2007 d'Opsware, la société qu'il dirigeait. Marc Andreessen figure parmi les icônes de la Silicon Valley, connu pour être à l'origine de nombreuses innovations. Or, sa voix s'est fait tout particulièrement entendre lors de la conférence téléphonique avec les analystes financiers en fin de semaine, expliquant que le départ de Mark Hurd était requis et que HP n'était pas l'affaire d'une personne. L'ancien dirigeant de Netscape fait partie du comité chargé de recruter le nouveau PDG.

Mark Hurd est consécutivement le deuxième PDG de HP à quitter le groupe en de mauvais termes. Avant lui, en 2005, Carly Fiorina a dû laisser son poste à la suite de désaccords avec le Conseil d'administration sur la stratégie de la société. La démission de Mark Hurd résulte peut être d'un souhait interne de restructurer les postes de direction et de redistribuer le pouvoir afin de faire de la place pour de nouvelles approches.