Google a accepté de détruire des milliards d'enregistrements de données, réglant ainsi un recours collectif qui accusait la firme de Mountain View de suivre clandestinement les utilisateurs qui croyaient naviguer en mode privé. Les plaignants avaient évalué le règlement à plus de 5 milliards de dollars, mais selon les termes de l'accord, Google ne versera aucun dédommagement. Les utilisateurs peuvent cependant demander individuellement une indemnisation à l'entreprise. Déposée en 2020, la plainte affirmait que Google collectait des données sur les utilisateurs de son navigateur web Chrome même lorsqu'ils activaient la fonction « Incognito », censée empêcher ce genre de suivi. Malgré l'option de navigation privée, les outils de Google sur les sites web, y compris ses technologies publicitaires, continuaient à collecter des données sur les utilisateurs.

Dans l'accord sur le règlement conclu en décembre, Google s’engage également à améliorer ses politiques de divulgation. Avec ce règlement, l’entreprise accepte de reformuler ses déclarations pour informer les utilisateurs que « Google » recueille des données de navigation privées, notamment en divulguant explicitement ce fait dans ses politiques de confidentialité et sur l'écran d'accueil « Incognito » qui apparaît automatiquement au début de chaque session Incognito », indique un document déposé dans le district nord de la Californie. « Les plaignants ont obtenu un règlement par lequel Google a déjà commencé à mettre en œuvre ces changements, sans attendre l'approbation finale du tribunal ».

En outre, au cours des cinq prochaines années, Google permettra aux utilisateurs en mode incognito de bloquer les cookies de tiers, ce qui constitue une avancée significative en matière de protection de la vie privée des utilisateurs. « Le règlement de l'affaire Google Chrome s'inscrit dans une tendance plus large de plaintes déposées par les consommateurs concernant l'utilisation de leurs données d'une manière inattendue », a déclaré Stephanie Liu, analyste principale chez Forrester. Le principal motif de cette action en justice était lié au fait que Google affirmait que le mode Incognito permettait « de naviguer en toute confidentialité » (Google a reformulé sa présentation en réponse à la plainte). Les utilisateurs ont fait valoir qu'ils ne s'attendaient pas à ce que Google recueille des volumes de données sur ces sessions de navigation prétendument privées.

La protection de la vie privée au cœur de l'actualité

Les préoccupations relatives à la protection de la vie privée en ligne sont de plus en plus importantes, et les risques sont considérables alors que l’IA est de plus en plus intégrée dans les plateformes technologiques. Les experts mettent en garde contre le fait que les collecteurs de données et les courtiers qui échangent des informations sur les utilisateurs établissent des profils personnels exhaustifs. En cas de faille de sécurité, ces données sensibles pourraient être échangées sur le dark web, ce qui créerait un risque sérieux d'usurpation d'identité. L'an dernier, un rapport du ministère américain de la Sécurité intérieure, l’US Department of Homeland Security, a révélé que plusieurs agences gouvernementales américaines s'étaient livrées à une utilisation non autorisée des données de localisation des smartphones, en violation des normes de protection de la vie privée.

Ces agences ont acquis des données de localisation et des identifiants publicitaires (AdID) par le biais de transactions avec des courtiers en données qui ont compilé ces informations dans de nombreuses applications. « De même, les plaintes, les actions en justice et les mesures réglementaires se sont multipliées à l'encontre des entreprises qui collectent ou partagent les données de leurs clients de manière fortuite », a indiqué Mme Liu. « L'augmentation du nombre de plaintes et de recours collectifs axés sur la protection de la vie privée montre que les consommateurs sont de plus en plus conscients de l'importance de la protection de la vie privée et qu'ils agissent en conséquence ». Selon l’analyste de Forrester, la transparence est aujourd'hui essentielle. Les entreprises doivent expliquer comment les données sont partagées et utilisées. « Et pour les entreprises qui envisagent d'élargir discrètement leurs politiques de confidentialité ou leurs conditions de service, la Federal Trade Commission (FTC) a déjà averti que cette pratique pourrait être déloyale ou trompeuse », a rappelé Mme Liu. « Ces décisions doivent tenir compte du client, savoir s’il sera d'accord avec la façon dont nous utilisons ou partageons ses données. Si la réponse est négative, il faudra retourner à la case départ ».

Une année parsemée de procès

Selon Bloomberg, sur le plan juridique, l’année 2024 sera difficile pour Google. Un procès important devant un jury est prévu en septembre, où Google devra répondre des allégations du Ministère américain de la Justice et d'un groupe de procureurs généraux d'État qui accusent Google d’avoir enfreint les lois antitrust en monopolisant la publicité numérique. De plus, dans un autre procès prévu en mars 2025, le Texas et plusieurs autres États accusent le géant technologique de pratiques déloyales en matière de technologie publicitaire. Enfin, un procès fédéral antitrust, portant sur le monopole illégal de Google sur le marché de la recherche en ligne, devrait s'achever en mai avec les plaidoiries finales face à un juge de Washington.