Terminée l'image d'un patrimoine poussiéreux et ennuyeux. En offrant ses archives en ligne au grand public, l'Institut national de l'audiovisuel (Ina) a prouvé que la mémoire pouvait être vivante. Cinq millions de visites par jour en une semaine pour 10 000 heures de télé et radio françaises, l'Ina plébiscitée a fait une révolution. Nathalie Innamorata a 42 ans et trois enfants. Sur ina.fr, elle a écouté le journal de sa naissance, regardé un extrait de Dim dam dom commenté par Marguerite Duras, vu Françoise Hardy face aux aléas du direct dans Age tendre et tête de bois. « En fait, je me suis retrouvée comme devant la vitrine d'un pâtissier: tant de gourmandises qu'on ne sait plus laquelle choisir (...) et, maintenant que j'ai l'info, c'est un peu comme mon album photos, je sais qu'il est là avec tous mes souvenirs et que je peux aller le regarder quand je veux ». Dans le cadre de la numérisation de ses fonds, l'Ina a mis en ligne ses archives dont 80% sont consultables gratuitement. Les 20% restants sont payants car considérés comme des oeuvres pour lesquelles il faut reverser des droits aux auteurs. Un succès immédiat Face à cette offre, le site a rapidement été victime de son succès et a dû mettre en place un plan d'urgence comprenant notamment le doublement de ses serveurs d'accueil et de visionnage pour pallier la saturation des premiers jours. « Le succès vient de la combinaison de plusieurs choses. (...) Nous avons une position unique car notre site allie quatre dimensions : l'accès au patrimoine, Internet, la télévision et l'émergence de la Vod (Video on demand) sur Internet », explique Safia D'Ziri, directrice des systèmes d'information de l'Ina et coordinatrice du projet. Déjà parmi les cinq premiers sites consultés en France selon Médiamétrie, l'ina.fr a bénéficié de l'attachement des Français aux archives audiovisuelles et radiophoniques et à la demande croissante de télé en ligne. Cette initiative est une première mondiale mais pour Zafia D'Ziri le contexte national est singulier. « En France, la télévision a été très concentrée. Des milliers de gens ont vu la même chose au même moment. Aujourd'hui on est tellement saturé en terme d'offre, qu'on revient à ce média archivé ». D'ailleurs pas de surprise et peu d'éparpillement, certains programmes se sont déjà démarqués et font partie du Top 10 comme l'interview de Yannick Noah, vainqueur du National en 1979, l'altercation entre Serge Gainsbourg et Guy Beart ou le 1er épisode des Shadoks. Montée en charge progressive Décidé à ne pas rester sur cette première victoire, l'Ina a des nombreux projets. D'un point de vue technique, l'infrastructure doit prochainement passer en gigabit afin d'avoir plus de bande passante pour accueillir plus de visiteurs. Pour l'éditorial, une rubrique Apprendre sera lancée en septembre et proposera des archives à vocation pédagogique pour les élèves et les professeurs. Enfin, 5 000 heures de programmes supplémentaires seront mises en ligne chaque année. Seule menace pour l'avenir : les revendications des auteurs comme celles du Syndicat national des journalistes (SNJ) de France 3 qui a estimé devoir percevoir des droits d'auteur pour les JT diffusés. Zafia D'Ziri se veut cependant rassurante. « Nous allons trouver une modalité de rétribution avec eux. Le 3 mai nous avons signé un accord avec le syndicat des musiciens et nous allons automatiser les versements pour que ceux-ci soient comptabilisés au nombre de clics ». Bien que considérée comme un « trip nostalgique collectif » par Charles Bremer, le correspondant du quotidien britannique The Times à Paris, cette mise en ligne des archives de l'Ina représente bien une révolution, celle de la rencontre de la mémoire et du présent. INA.fr, mode d'emploi Explorer, regarder, conserver 1 - Explorer La recherche est pyramidale. Vous commencerez par choisir un thème, une personnalité, une époque ou un programme. Chaque sujet est ensuite classé en différentes catégories, la recherche s'affine donc rapidement. Une série de bandeaux récapitulatifs contenant le titre de l'émission, la chaîne, la date et la durée de diffusion permet ensuite de choisir le programme à visionner. 2 - Regarder L'écran de visionnage est accompagné d'une fiche média très didactique qui indique le contenu exact du programme. Le visionnage en quart écran démarre presque instantanément et il est gratuit pour 80% des programmes. Pour passer en mode plein écran, il faut télécharger le programme et s'acquitter d'une somme pouvant aller de 1 à 12 euros pour une location ou un achat. A noter : les services de l'Ina sont accessibles pour tous les systèmes d'exploitation (Windows, Linux, Mac OS X), pour tous les navigateurs (Firefox, Internet Explorer, Safari) et les vidéos sont lues avec Real Player, Windows Media ou DivX Player. 3 - Conserver Pour conserver un programme, il suffit de l'ajouter dans le panier de votre espace personnel, de le télécharger (les fichiers audio sont disponibles en MP3) et de le graver. Le règlement peut se faire par carte bancaire ou via le système Internet Plus. Le site propose de plus une formule prépayée allant de 10 à 50 euros si vous devenez un usager régulier. A noter : tous les programmes sont protégés par tatouage ou cryptage pour identifier l'acheteur du document.