Données incomplètes, informations erronées, fichages injustifiés... Les conclusions de l'enquête menée par la Cnil sur le Stic (Système de traitement des infractions constatées) sont inquiétantes. Ce fichier de police judiciaire géré par le ministère de l'Intérieur a vocation à recenser les infractions afin d'aider le travail des enquêteurs. Il contient des fiches concernant 5,5 millions de personnes mises en cause, 28,3 millions de victimes et 36,4 millions de procédures. Les 100 000 agents de police qui y ont accès le consultent 20 millions de fois chaque année. Devant tant de données sensibles, il paraît affligeant que le taux d'erreurs relevé par la Cnil soit considéré comme « sidérant » par l'autorité administrative. De fait, seules 17% des fiches sont exactes et contiennent des informations à jour. Cette « absence quasi systématique de mise à jour » serait essentiellement imputable au parquet, qui ne renseigne les traitements sans suite que dans 21,5% des cas. Pire, seules 6,8% des relaxes sont mentionnées dans le fichier, et moins de 0,5% des non lieu. Ainsi, un individu peut-il apparaître comme étant mis en cause dans une affaire alors même qu'il a été déclaré innocent par un tribunal. Des conséquences sociales considérables Cet état de fait est d'autant plus fâcheux que le Stic est utilisé dans le cadre d'enquêtes administratives, menées pour des recrutements dans les secteurs de la sécurité, de la magistrature, ou pour des emplois aéroportuaires. En résultent des pertes d'emplois ou des refus de recrutement injustifiés, uniquement dus à l'inexactitude des données figurant au fichier. Plus d'un million d'emplois sont concernés, ce qui incite Alex Türk, le président de la Cnil à déplorer des « conséquences sociales considérables ». S'ajoutent à ces dysfonctionnements un « manque de rigueur dans la gestion des habilitations et les attributions de mots de passe » par les policiers chargés de consulter et d'alimenter le fichier, et de fréquentes erreurs de saisie. Pour tenter d'endiguer ces dérives, la Cnil formule onze propositions, allant de la mise en place d'une procédure pour sécuriser les opérations de saisies à l'obligation de respecter les durées de conservation des informations.