Entretien avec Jean-Pierre Fieux, vice-président exécutif du groupe Atos Origin, en charge des ressources humaines. Lemondeinformatique.fr: Vous avez pris les rênes de la direction des ressources humaines d'Atos Origin fin 2005 après avoir été DRH de l'entité « Schlumberger Oilfield Services » de Schlumberger (l'une des plus grandes mulinationales de fourniture de services pétroliers) Quels sont les chantiers prioritaires que vous menez ? Jean-Pierre Fieux : Nos priorités concernent le recrutement et la fidélisation des compétences dont nous avons besoin. Cette année, nous souhaitions recruter 9000 collaborateurs au niveau du groupe et 2500 en France. Nous avons aujourd'hui atteint à peu près la moitié de ces objectifs, ce qui correpond aux flux de recrutement habituels chez Atos Origin. La reprise automnale devrait nous permettre de compléter nos recrutements. Un tiers des embauches concerne des jeunes diplômés, le reste des personnes déjà en emploi. Nous cherchons des concepteurs/développeurs (ingénieurs développement et systèmes), des directeurs et des chefs de projet, des consultants techniques compétents sur les outils d'Oracle et de SAP, des responsables de compte et des techniciens pour nos activité d'infogérance. Sachant que le marché de l'emploi est tendu, quels moyens particuliers mettez-vous en oeuvre pour séduire les profils les plus demandés ? Nous avons renforcé nos relations avec les écoles afin d'avoir une présence régulière dans les cycles d'enseignement et que les jeunes connaissent Atos Origin avant leur sortie de l'école. Nous avons eu plusieurs initiatives particulières en ce sens telles que la création d'une chaire d'enseignement avec l'école HEC sur le thème « Stratégie de croissance et management de l'intégration ». J'ai rejoint le comité pédagogique de cette chaire afin de faire en sorte que les formations soient en adéquation avec nos besoins. Je dois bientôt faire une présentation de la société devant les étudiants en espérant créer des contacts de qualité avec eux. Parallèlement à ce type d'initiative, nous mettons en place au sein d'Atos Origin une cellule de recrutement qui travaillera à l'échelle du groupe afin de coordonner et d'harmoniser l'ensemble des pratiques de recrutement et de relations avec les écoles qui sont aujourd'hui menées dans nos différentes divisions. Enfin, nous allons réactiver le processus de la cooptation, en introduisant notamment des récompenses pour les apporteurs de jeunes recrues, car ce processus représente, lorsqu'il est actif, 20% de nos recrutements. Comment retenir les profils les plus demandés ? Nous avons plusieurs projets destinés à leur offrir des perspectives de carrière et d'évolution. L'un est associé à notre programme de formation Gold. Celui-ci s'adresse à des collaborateurs ayant deux à trois ans d'expérience. Il consiste à leur proposer une année de formation universitaire en alternance sanctionnée par un diplôme de type Master, dans une université anglaise. Deux cent personnes l'ont suivi cette année dans le monde dont la moitié de Français. Je souhaite redynamiser ce programme en lui associant un tutorat pour chaque « étudiant ». Bernard Bourigeaud (président d'Atos Origin, NDLR) lui-même en suivra trois. Nous allons aussi mettre en place avant et après la formation des points « carrière » pour échanger avec les collaborateurs concernés sur leurs souhaits d'évolution et les voies pour y parvenir. Nous souhaitons parallèlement étendre les entretiens de carrière au maximum de nos salariés. J'aimerais les rendre systématiques dans les entretiens annuels des 15000 personnes qui ont des objectifs afin de leur permettre de s'exprimer sur leurs souhaits d'évolution et de préparer l'avenir. Ces entretiens sont plutôt focalisés sur l'examen des performances aujourd'hui. Les entretiens de carrière doivent-ils se faire avec les managers qui réalisent les entretiens de performance ? Oui car ils connaissent les perspectives d'évolution possibles. Je pense qu'il faut toutefois adjoindre d'autres interlocuteurs pour les points carrière, un manager d'un niveau supérieur pour élargir la vision des potentialités d'évolution et un responsable des ressources humaines pour faire le lien avec le réseau RH du groupe, faciliter l'identification des possibilités de mobilité. Ces entretiens de carrière devront avoir lieu tous les 3 à 5 ans pour chaque personne. Nous nous équipons parallèlement sur le plan informatique pour accompagner la gestion de carrières. Nous allons implémenter en 2007 un outil baptisé « Performances on line » destiné à archiver sous format électronique les données résultants des entretiens annuels afin de pouvoir les partager. L'objectif est de lier cet outil à notre base de compétences, « Global Competency Model », qui nous permet d'identifier et de cartographier nos compétences. Ces outils donnent l'opportunité d'améliorer la gestion de carrières et la mobilité. Comment éviter de faire flamber les salaires sur certains profils très demandés, comme les consultants SAP ? La réponse est la gestion de carrières. Nous associons un plan de développement des compétences à la proposition de rémunération. Je pense que peu de personnes partent d'une société uniquement pour faire un gain financier. Elles misent aussi sur un enrichissement à plus long terme qui passe par autre chose que la rémunération. Concernant les consultants SAP, nous allons mettre en place une université interne afin de former des collaborateurs qui le souhaitent et/ou qui ont des compétences qui ne sont plus utilisées. Les technologies évoluent vite, le off-shore menacent certains métiers : comment appréhendez-vous ce phénomène ? Atos Origin a la chance d'avoir une bonne vision de ses compétences, notamment grâce à l'outil Global Competency Model, ce qui devrait lui permettre d'anticiper l'avenir. Nous pouvons en effet comparer ce vivier aux compétences dont nous avons besoin pour mener les projets futurs. Plus généralement, je pense que les employeurs doivent se sentir responsables du parcours de leurs collaborateurs au sein de leur société, ce qui est important pour retenir les talents.