Après « De la Démocratie en Amérique » d'Alexis de Tocqueville, voici « Du numérique en Amérique » de David Fayon, sous-titre de Made in Silicon Valley qui vient de paraître chez Pearson. Dans les deux cas, il s'agit de tirer du modèle du Grand Frère Etats-Unis des leçons à appliquer à notre modeste hexagone. Auteur en série spécialiste du web social et de la transformation numérique de la société, David Fayon a pu, après un déménagement en Californie pour raisons familiales, rencontrer ceux qui comptent Outre-Atlantique, de la petite start-up à Google en passant par l'industrie automobile ou les écoles. De ces interviews, il a tiré une synthèse dans cet ouvrage militant.

Comme Alexis de Tocqueville avant lui, David Fayon constate que le creuset cosmopolite a créé des conditions très particulières aux Etats-Unis. Mais il y a aussi des différences culturelles fondamentales entre France et Etats-Unis, par exemple dans le rapport au risque.

Réflexion approfondie sur l'origine et les forces de l'e-Amérique

L'essentiel de l'ouvrage se concentre sur les Etats-Unis. Il en étudie les ressors de puissance, l'histoire technologique et économique. Il le fait pour la macro-économie, pour les régions (Californie, New York...) mais aussi pour les entreprises, en prenant en exergue la célèbre citation de Nelson Mandela : « je ne perds jamais ; soit je gagne, soit j'apprends. » La disruption ne fait pas peur : elle est même recherchée, malgré ses risques. Un chapitre de bilan et perspectives achève cette partie principale du livre avant qu'un ultime chapitre ne tire des leçons utiles pour les entreprises et l'Etat français. En l'occurrence, il insiste surtout sur le besoin de regarder (et de faire regarder) ce qui se passe chez l'Oncle Sam et donne trente recommandations.

Très documenté, sachant revenir sur des fondamentaux des théories économiques (comme les paradoxes issus des principes d'Adam Smith revendiqués et détournés) comme sur l'Histoire, l'ouvrage de David Fayon ne cache pas un parti-pris très pro-américain. Au risque, parfois, de se laisser glisser vers une certaine naïveté, par exemple quand il cite largement Louis Nauges, contempteur béat de la souveraineté numérique. S'il ne s'agit donc pas de la Bible pour un 21ème siècle, Made in Silicon Valley est clairement une pierre importante dans une large réflexion autour de la société numérique et de son économie, au delà de la seule transformation numérique des entreprises. De ce point de vue, le titre choisi est certes vendeur mais très réducteur.