L’année 2023 siffle-t-elle la fin du déni vis-à-vis de l’impact énergétique et environnemental des entreprises ? La crise du COVID puis l’invasion de l’Ukraine par la Russie ont favorisé un contexte de tensions sur le marché, avec le retour d’une inflation due à la hausse du coût de l’énergie. Une situation qui pousse les entreprises qui veulent rester compétitives à trouver des moyens de réduire leur consommation d’énergie.

En parallèle, la société évolue et la prise en compte des problématiques environnementales n’a jamais été aussi forte, chez les consommateurs comme au niveau du législateur. Or, pour les entreprises, une partie de la réponse à ces attentes se situe au niveau de leur système d’information.

En effet, depuis les années 2000, la numérisation à marche forcée de notre économie autour des nouvelles technologies a radicalement transformé le fonctionnement des entreprises et fait des systèmes d’informations les clés de voûte de notre économie. De très nombreuses activités sont aujourd’hui structurées autour de l’IT : réseaux, parcs informatiques, serveurs et data centers, sites Web, applications métiers, etc.

On estime que les usages numériques d’une entreprise peuvent facilement représenter entre 30% et 40% de son bilan carbone mais aussi une part non-négligeable de sa consommation électrique. Mais pour pouvoir prendre des mesures utiles, elles doivent avoir une vue d’ensemble de leur consommation d’énergie, et cela doit inclure les infrastructures informatiques critiques, notamment les centres de données, le cloud et les infrastructures périphériques.

Le numérique, un secteur plus polluant que le secteur aérien

Le numérique est aujourd’hui devenu omniprésent et incontournable dans notre vie quotidienne. Que ce soit pour les États, les entreprises ou encore les citoyens. Dans son ensemble, le secteur est aujourd’hui responsable de 4% des émissions mondiales de gaz à effet de serre. C’est plus que la pollution du secteur aérien, qui plafonne autour de 3%.

Par ailleurs, si cette part demeure modeste par rapport à d’autres secteurs comme les transports ou le bâtiment, l’omniprésence du numérique dans notre économie laisse présager une forte croissance de cette empreinte carbone à l’avenir. Selon le pré-rapport de la mission d’information sur l’empreinte environnementale du numérique du Sénat, les émissions de GES du numérique pourraient augmenter de manière significative si rien n’est fait : + 60 % d’ici à 2040, soit 6,7 % des émissions de GES nationales.

À quoi correspond cette empreinte carbone pour une entreprise ? La grande majorité des émissions de GES du numérique sont liées à la fabrication des devices, à leur transport et à leur utilisation.

Dans le détail, selon l’étude de l’ADEME et l’Arcep sur l'impact environnemental du numérique en France publiée le 19 janvier 2022, on peut diviser l’empreinte carbone d’un Système d’information en 3 grands piliers :

  • de 65% à 92% est imputable directement aux terminaux, en particulier aux écrans et téléviseurs ;
  • de 4% à 20% de celle-ci est liée aux data centers ;   
  • de 4% à 13% est liée aux réseaux télécoms.

Anticiper la contrainte législative

Pour les entreprises, réaliser un bilan carbone et énergétique de leurs systèmes numériques et se doter d’outils pour maîtriser leurs consommations est donc devenu un axe stratégique majeur. D’autant que cela permet d’anticiper une contrainte législative qui est de plus en plus présente.

Récemment, de nombreux textes de loi liés à cette problématique ont été promulgués. On peut citer par exemple l’article 173 de la loi de transition énergétique pour la croissance verte (LTECV, 2015) qui impose aux entreprises d’inclure dans leur rapport de gestion annuel l’empreinte carbone de leurs activités. 

Depuis le 1er janvier 2023, le dispositif des bilans d’émissions de gaz à effet de serre (BEGES) prévoit que les entreprises, administrations et collectivités réalisent tous les 3 ans un bilan de leurs émissions de GES (scope 1, 2 et 3) qui doit être rendu public. Il concerne toutes les personnes morales de droit privé de plus de 500 salariés ainsi que les personnes morales de droit public de plus de 250 salariés et les collectivités de plus de 50 000 habitants. Ce seuil sera abaissé aux entreprises de droit privé de plus de 250 salariés en janvier 2024.

Pour les acteurs publics, la question de la mesure de l’empreinte carbone et de la réduction des coûts de l’énergie s’inscrit aussi dans la logique du plan de sobriété énergétique du Gouvernement français, qui s’est fixé l’objectif de baisser de 10% la consommation du pays en 2 ans et d’améliorer l’efficacité énergétique des centres de données (data centers) de l’État.

Enfin, ce sujet de l’empreinte environnementale d’un SI dépasse aussi la simple question du bilan carbone et des économies d’énergies. C’est également, pour de nombreuses entreprises, un catalyseur d’innovations grâce à de nouvelles manières de penser leur activité (autour de l’éco-conception, par exemple). C’est aussi un véritable critère pour attirer les jeunes talents les plus prometteurs alors que la nouvelle génération met beaucoup l’accent sur ces sujets. Enfin, ce sera aussi un garde-fou contre les procès en greenwashing qui se multiplient, notamment sur les réseaux sociaux.

Du site Web aux infrastructures critiques, ne rien négliger

Ainsi, la question de l’impact environnemental d’un système d’information pèse de plus en plus sur les entreprises. Il s’agit d’un sujet économique, d’un sujet de gouvernance et d’un sujet stratégique.

Et pour être efficace, rien ne doit être négligé, du site Web de l’entreprise aux infrastructures critiques, en particulier les serveurs et centre de données. Ces derniers jouent d’ailleurs un rôle important dans la facture d’électricité des entreprises : les centres de données représentent environ 4 % de toute l’électricité consommée dans le monde.

Sur ce sujet, la virtualisation et le multi cloud jouent un rôle essentiel dans la consolidation des centres de données et contribuent ainsi à réduire l’impact environnemental. Cela améliore leur efficacité globale et atténue l'augmentation des émissions CO2 des infrastructures. À condition d’être bien pilotées, ces approches facilitent aussi la réalisation des économies de consommation d'énergie et donnent un avantage concurrentiel aux sociétés.