Par un drôle de paradoxe, d'un côté le secteur de l'informatique est extrêmement tendu et les prévisions osent chiffrer 600 000 informaticiens à horizon 2015, de l'autre les jeunes diplômés sont très recherchés mais il y a pléthore de formations dont certaines semblent souffrir. Deux raisons majeures peuvent être avancées : une rude concurrence entre les écoles et la désertion annoncée des jeunes qui conduit le Syntec Informatique à promouvoir l'image des métiers de l'informatique dans une campagne intitulée « changeursdemonde ». Lors de son lancement, Thierry Siouffi, vice-président du Syntec Informatique, a martelé « qu'il fallait en finir avec l'image de l'informaticien », représenté dans l'imaginaire collectif comme solitaire, voire autiste... L'heure semble donc relativement préoccupante pour qu'au moins deux écoles de renom et d'expérience, l'Esigetel (Ecole supérieure d'ingénieurs en informatique et génie des télécommunications), et Supmeca pensent aux meilleurs moyens pour se démarquer et parviennent à une conclusion similaire à l'issue d'une réflexion qui a commencé en 2006 : rester seule revient à se condamner à disparaître.

Des filières suivant l'évolution de l'emploi


L'Esigetel a fêté ses 20 printemps quelques mois après avoir fait le choix de se constituer en association. Son directeur Nacef Berkoukchi en a profité pour dessiner l'avenir en quatre axes : formation ; rayonnement international ; recherche appliquée ; ancrage avec les entreprises. « En termes de formation, nous réfléchissons aux nouvelles filières qui suivent l'évolution de l'emploi. 60% de nos cours sont assurés par des professionnels, nous allons proposer deux masters spécialisés en 2010 qui concernent les réseaux et télécoms ainsi que les services. » L'Esigetel n'est pas encore adhérente à la Conférence des Grandes Ecoles mais elle met tout en ?uvre pour entrer dans ce cercle très fermé et suit à la lettre les préconisations du rapport Hetzel et des ministres de l'Enseignement supérieur et de la Recherche d'une part et de l'Industrie d'autre part, qui ont pris conscience des lacunes de la recherche française et multiplient les actions en ce sens : François Loos (ministre de l'Industrie) a annoncé vouloir donner une visibilité internationale aux écoles des Mines et avec François Goulard (ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche), ils ont signé un contrat quadriennal avec l'Inria. Au-delà des symboles, les ministres ont rappelé l'importance d'une visibilité sur le plan international d'une part, et d'autre part, la nécessité de rapprocher davantage encore les entreprises du secteur high-tech des écoles ou des universités pour mutualiser la recherche en vue d'être performantes et innovantes.

Rapprochement avec les entreprises


Sur le premier point, Nacef Berkoukchi annonce « vouloir faire venir davantage d'Erasmus à l'Esigetel et qu'en 2010, 30% de nos étudiants soient trilingues, étape nécessaire pour rayonner dans le monde. Aujourd'hui, tous nos étudiants doivent faire un stage à l'étranger mais ces stages sont malheureusement encore trop courts. » Quant au rapprochement avec les entreprises, le directeur souligne la nécessité « d'accentuer l'implication des entreprises du 77. Nous allons également lancer un contrat en alternance et créer un club de partenaires autour des métiers émergents. » Dernier axe, la recherche. « L'Esigetel est membre du polytechnicum de Marne-la-Vallée. Nous sommes également partenaires avec l'université de Marne-la-Vallée pour que nos élèves puissent obtenir des licences en informatique ou en électronique par équivalence. Nous souhaitons que 10% de nos étudiants soient inscrits en thèse de doctorat en 2012 et allons poursuivre des partenariats avec des laboratoires de recherche. Nous avons 12 personnes en recherche appliquée et l'ambition de monter ce chiffre à 24 en 2012 », conclut Nacef Berkoukchi.

Des synergies dans l'aéronautique et l'informatique


L'enthousiasme du directeur de l'Esigetel est partagé par Supmeca (Institut supérieur de mécanique de Paris, un demi-siècle cette année) et l'Eisti (Ecole internationale des sciences du traitement de l'information). Le rapprochement des deux écoles a été officialisé en avril 2006 dans le but de créer, à terme, un INP (Institut National Polytechnique). D'ailleurs, à la rentrée 2007, l'Eisti intègrera le même concours que Supméca (Concours Communs Polytechniques). L'opération s'avère « une opération très réussie » pour les deux parties qui ont échangé et partagé leurs compétences pour proposer à leurs étudiants une plus grande diversité de formations et d'opportunités à l'international. Elle a également permis d'effectuer des travaux de recherche pointus dans le domaine de l'aéronautique, à la demande d'un acteur issu de l'industrie aéronautique française. Associées à l'Ensea (Ecole nationale supérieure de l'électronique et de ses applications), Supméca et l'Eisti ont collaboré à la réalisation d'un système de commandes électriques destiné aux avions de tourisme. Le prototype devrait être présenté au Salon International de l'Aéronautique et de l'Espace de Paris (le Bourget du 18 au 24 juin 2007). Enfin, le rapprochement a permis une meilleure coopération en matière d'enseignements informatiques : les étudiants de Supméca ont suivi des cours dispensés par les enseignants de l'Eisti sur des thématiques non enseignées à Supméca (l'option « ingénierie financière » est prévue pour 2008) et de leur côté, les élèves de l'Eisti se verront proposer la possibilité de suivre les options « systèmes de production » et « mécatronique » qu'ils pourront suivre à Supméca.