Alors que les magasins fermaient dans le monde entier en 2020 du fait de la pandémie, le détaillant de vêtements PVH (propriétaire des marques Calvin Klein et Tommy Hilfiger) savait qu'il devait agir rapidement pour enrayer les ventes perdues. L'entreprise a relevé le défi notamment en renforçant sa présence numérique, en utilisant des logiciels pour déplacer les stocks inutilisés dans les magasins de détail et les entrepôts d'Amérique du Nord et en stimulant les ventes en ligne pour les fêtes. Durant la crise, de nombreux détaillants ont réduit leurs dépenses. De son côté, PVH a augmenté ses investissements dans la technologie pour développer ses canaux numériques et a donné la priorité aux projets essentiels, notamment en permettant aux consommateurs d'acheter des marchandises en ligne et de se les faire expédier depuis les magasins, et en rendant son site web plus adapté aux achats mobiles, selon Bob Bolger, vice-président général du groupe technologie et processus (TPG) de PVH pour les Amériques.

« Le covid-19 a montré à tout le monde la rapidité avec laquelle on peut faire les choses quand on ne se concentre pas sur le fait de faire bouillir l'océan », affirme Bob Bolger, qui compare l'impact de l'épidémie sur le secteur de la vente au détail « au fait de se réveiller au quatrième quart d'un match de football américain en étant mené de trois points ». En d'autres termes, PVH s'est concentré sur tout ce qui a trait au e-commerce pour satisfaire le consommateur. Le groupe a simplement pris le même chemin emprunté par d’autres secteurs. Une étude réalisée par Gartner en 2021 montre en effet que sur 305 PDG interrogés, 18% d’entre eux ont cité la numérisation et 16% le e-commerce comme leurs principales priorités de business pour l'année. Pour sa part, PVH a redoublé d'efforts pour s'assurer que les consommateurs puissent acheter ses produits en ligne à partir de n'importe quel appareil connecté et les recevoir rapidement, une initiative qui a valu à PVH un prix US CIO 100.

Accélérer le débit de livraison et la gestion des stocks

Les fermetures des magasins ont posé deux problèmes à PVH : les stocks de son fournisseur logistique tiers étaient insuffisants pour répondre à l'explosion de la demande, tandis que la rotation des stocks stagnait dans les magasins du pays. La firme américaine PVH regroupe en effet 9 marques présentes dans une quarantaine de pays. Pour atténuer les effets, la société a choisi de répondre à la demande de ses produits directement à partir de ses magasins de détail, en les transformant ostensiblement en micro-centres d'approvisionnement, explique Brian McGrath, vice-président du commerce unifié pour TPG Americas de PVH. En trois semaines, les ingénieurs logiciels ont écrit et lancé un service permettant d'exécuter les commandes des grands magasins, en commençant par les sous-vêtements Calvin Klein et les vêtements pour femmes Van Heusen. Alors que la micro-exécution figurait sur la feuille de route stratégique de PVH, la pandémie « nous a obligés à procéder immédiatement à cette exécution dans des micro-localisations », précise M. McGrath.

Tout au long de l'été, PVH a développé ses capacités et son assortiment afin d'augmenter le débit de l'exécution en magasin, notamment en simplifiant le processus de préparation des commandes dans les magasins, en réduisant la quantité de papier imprimé et en s'intégrant à FedEx pour une exécution automatisée. En septembre, l'équipe technique avait développé suffisamment de compétences pour exécuter les commandes de produits depuis son centre de distribution interne de Jonesville, en Caroline du Nord. Comme la plupart des détaillants, plus de 70 % des consommateurs de PVH effectuent des transactions à partir de téléphones mobiles, ce pourcentage dépassant 90 % pendant le Black Friday. Par conséquent, PVH savait qu'il devait améliorer l'expérience de commerce électronique pour ce type d'utilisateurs. Parallèlement à ses efforts d'achat en ligne et d'expédition depuis le magasin, PVH a réduit d'une seconde l'expérience de son site web mobile tout en créant une expérience de paiement « mobile-first » en réduisant le nombre de clics nécessaires à l'achat en consolidant les étapes et en réduisant les erreurs des clients.

Un chatbot et un modèle de livraison hybride

L'équipe d'ingénieurs a également déployé un chatbot sur le site web pour résoudre les motifs de contact les plus courants, tels que les questions sur les délais d'arrivée des commandes et les processus de retour, sans l'aide d'un agent du service clientèle. Le fait de décharger ce type d'approche transactionnelle a permis de réduire les temps d'attente pour les clients, avec un taux de réussite de 40 % dans la résolution des questions des consommateurs, tout en permettant aux équipes de service de se concentrer sur des contacts à plus forte valeur ajoutée. PVH a également mis en place une campagne de sensibilisation par e-mail après l'achat, fournissant aux consommateurs des mises à jour sur l'état de leur commande, ainsi que sur les retards potentiels, ce qui a contribué à réduire les appels des clients. Pour y parvenir, PVH a dû travailler rapidement et a opté pour un modèle d'exploitation hybride pour la livraison des logiciels, précise Brian McGrath. Cette approche comprenait un modèle basé sur des projets dans lequel les logiciels étaient livrés selon le modèle traditionnel en cascade, ainsi qu'un modèle d'exploitation de produit émergent privilégiant les cycles de livraison flexibles.

Par exemple, l'initiative « ship-from-store » a été livrée comme un produit minimum viable (MVP), avec des fonctionnalités introduites dans des périodes de deux semaines, pour finalement arriver à sa forme complète avant le Memorial Day, ajoute Brian McGrath. Pendant ce temps, PVH s'est occupé de la conversion du site Web dans le cadre de périodes de travail mensuelles (et parfois plus longues), chaque période de travail ciblant une page spécifique du flux de paiement remanié, en commençant par le processus de paiement avant de perfectionner l'expérience du panier d'achat. L'adhésion au modèle de prestation hybride a nécessité une gestion du changement en douceur, grâce à la communication. Une fois que la direction a communiqué le plan d'action, les dirigeants ont veillé à ce que cette approche se répercute dans toute l'organisation, explique Bob Bolger. « Nous avons d'abord dû faire en sorte que les associés pensent de la même manière et s'alignent sur ce processus de pensée », poursuit-il. Fonctionnant déjà de manière autonome, l'équipe du service clientèle de PVH a continué à servir les clients, même si c'est par le biais de leur ordinateur portable, depuis leur domicile.

Les données, une mine d’or pour l'e-commerce

Pour la conversion de son site mobile, PVH a mesuré l'impact de ses mises à niveau sur le taux de rebond, la valeur moyenne des commandes et les taux d'abandon de panier. Il a évalué les messages d'erreur, en examinant de près les erreurs qui avaient un impact important. Par exemple, l'entreprise a détecté 12 erreurs différentes lors du passage à la caisse qui nuisaient à l'expérience de l'utilisateur. Après avoir corrigé ces problèmes, PVH a enregistré des taux de conversion proches de 100 % chez les futurs clients qui auraient vu ces erreurs. Ces efforts ont porté leurs fruits, puisque l'entreprise a enregistré une augmentation de 70 % de son activité de e-commerce, selon le rapport sur les résultats du troisième trimestre 2020 de PVH. Le canal d'expédition à partir du magasin a livré plus de 120 000 commandes aux consommateurs. L'expédition depuis son entrepôt de Jonesville a permis d'augmenter la capacité d'expédition de 30 000 unités par jour pendant le pic des fêtes.

Bien sûr, l'optimisation de la conversion des sites est un processus évolutif. À cette fin, PVH étudie également la manière de personnaliser les recommandations de produits pour chaque acheteur, un Graal atteint par Amazon.com et certains autres sites qui utilisent l'analyse de données pour améliorer l'expérience client. « Nos dirigeants veulent se baser sur des faits et la façon d'y parvenir est de mettre en place les bons systèmes d'analyse et de faire en sorte que nos associés tirent parti de ces informations et les utilisent », conclut M. Bolger.