Nexedi, distributeur et intégrateur du PGI Open Source ERP 5, vient d'obtenir en référé du Tribunal Administratif de Lille l'annulation d'un appel d'offres de marché public publié par l'Agence de l'Eau Artois Picardie le 28 septembre 2010. Cet appel d'offres visait à l'acquisition d'un progiciel de gestion budgétaire, comptable et financière. Or les clauses du cahier des charges imposait l'usage de produits des éditeurs Business Object (groupe SAP) et Oracle, sans laisser la porte ouverte des « ou équivalent ».

Outre l'annulation du marché public, l'établissement public se voit, de plus, condamné à rembourser ses frais judiciaires à Nexedi à hauteur de 1200 euros. L'argumentaire présenté par l'Agence de l'Eau Artois Picardie tel que retranscrit dans le texte du jugement est classique : les solutions imposées permettaient la concurrence entre intégrateurs et correspondaient aux habitudes de l'établissement public. Celui-ci a tenté d'obtenir l'annulation de la procédure en prétextant que Nexedi n'était pas en mesure de répondre à ses attentes et, par conséquent, n'avait pas d'intérêt à agir. Le tribunal ne l'a suivi sur aucun de ses arguments. La juridiction a en effet admis l'intérêt à agir de Nexedi, capable de répondre aux exigences réglementaires. Et en se basant sur l'article 6 du Code des Marchés Publics, il a conclu au caractère anti-concurrentiel et donc illégal des exigences de l'établissement public. L'appel d'offres aurait dû préciser expressément les caractéristiques techniques attendues sans faire référence à des produits précis ou une marque donnée. Si faire référence à des produits précis permettait de simplifier la description, une mention de type « ou équivalent » est obligatoire.

Des leçons amères


Des marchés publics faisant référence à des produits précis ou à des marques sont très fréquents en informatique. Le cas le plus habituel est celui de la suite bureautique Microsoft Office alors même qu'elle est très simple à remplacer par un produit concurrent, Corel Office, Symphony, OpenOffice ou LibreOffice par exemple. Le cas se présente également, comme ici, pour des logiciels plus au coeur des métiers ou d'infrastructure. Jean-Paul Smets, PDG de Nexedi, admet volontiers : « il y a bien sûr un risque à intenter un procès à un client potentiel. » Ce risque limite singulièrement les recours malgré les très nombreuses infractions au Code des Marchés Publics que l'on constate à la lecture du Bulletin Officiel des Annonces de Marchés Publics.

Mais cette condamnation n'arrêtera pas toutes les mauvaises pratiques. « Il arrive ainsi que l'installation et l'exploitation-maintenance soient distingués dans deux marchés, qu'un éditeur de logiciel propriétaire casse les prix sur le premier marché et soit le seul fournisseur possible sur le second » dénonce Jean-Paul Smets. De telles mauvaises pratiques peuvent ainsi aboutir à des coûts supérieurs pour les acteurs publics. Or la bonne gestion des deniers publics, surtout en période d'austérité, exige de combattre ce type de comportement.