Dans la galerie des acteurs français de l’économie numérique, l’éditeur Talentsoft fait office de pépite IT (voir Truffle 100 France). Créé en 2007 par Joël Bentolila (CTO), Jean-Stéphane Arcis (CEO) et Alexandre Pachulski (CPO), le spécialiste de la gestion des ressources humaines en mode SaaS affiche aujourd’hui un chiffre d’affaires de 42 millions d’euros pour l’année 2016, avec une croissance de 50% par rapport à l’année précédente. Cette année, l’objectif fixé à tous les employés – 600 personnes en tout dont 330 à Boulogne-Billancourt et 150 développeurs -  est d’atteindre les 50 millions d'euros (+35%). En 2019, c’est le cap des 100 millions qui est visé. « En 2017, un des objectifs est de réaliser plus de revenus à l’étranger qu’en France ». Pour ce faire, il n’est pas encore question de vraiment attaquer le marché américain, mais d’accompagner les multinationales européennes avec de très grands partenaires comme Accenture ou Capgemini pour arriver à une étape supplémentaire. 

« Nous nous battons aujourd’hui contre des californiens [SAP/SuccessFactors, Oracle/Taleo, Cornerstone et Workday] dans la gestion des talents et du capital humain, même si notre assise est avant tout européenne », nous a indiqué lors d’une conférence de presse Jean-Stéphane Arcis, CEO de la société. Avec 1500 clients dont Pôle Emploi (55 000 postes équipés), PSA, le Crédit Agricole, la SNCF, Vinci, Safran, Geodis, Bolloré, JC Decaux, Monoprix ou encore Dassault, TalentSoft n’a plus vraiment besoin de démontrer son savoir-faire, mais les trois cofondateurs restent attachés à l’enrichissement de leur plate-forme et au développement international.

Si les trois dirigeants de Talentsoft partagent un même bureau devant une vaste terrasse, le télétravail vient garantir l'isolement si besoin. 

Une présence timide aux Amériques 

Talentsoft possède bien une présence au Canada (30 clients et 10 000 utilisateurs), au Brésil ou encore à Singapour, mais il s’agit d’accompagner les filiales de grands groupes. Même Salesforce.com, qui fait office de géant sur le marché du CRM, a pris du temps pour lancer ses services un peu partout dans le monde. La comparaison est d’ailleurs intéressante car le modèle économique est proche. Si Salesforce a mis 16 ans pour atteindre un ebitda positif (une rentabilité opérationnelle), TalentSoft a encore le pied sur l’accélérateur et a recruté 200 collaborateurs en 2016. « Il s’agit aujourd’hui de bien gérer notre trésorerie plutôt que d’atteindre un ebitda positif », indique Jean-Stéphane Arcis.

L'open space reste la règle chez Talentsoft même si des espaces pour petits groupes viennent adoucir le cadre de travail sur le plateau.

Talentsoft peut toujours compter sur ses investisseurs – Alto Invest, Bpifrance, Highland Capital et Goldman Sachs qui ont apporté 44 millions d’euros depuis 2011 – pour accompagner sa croissance, mais les revenus récurrents du modèle SaaS génèrent un effet boule de neige. « Nous avons aujourd’hui 80 millions d’euros en commandes grâce au backlog SaaS et de nombreux partenariats stratégiques avec de très grosses sociétés qui ont choisi de travailler avec nous », poursuit le dirigeant. « Ce modèle est très bon pour la sécurité et la visibilité. Notre taux d’attrition est d’ailleurs de 4% contre 7% en moyenne pour les autres acteurs du SaaS ».

Des locaux très start-up californienne 

Pour marquer ses 10 ans et accompagner sa croissance, Talentsoft a emménagé dans de confortables locaux à Boulogne-Billancourt tout en cherchant à trouver le bon équilibre entre espace de travail collectif et télétravail. «  Il s’agit avant tout d’ouvrir les chakras sur le gestion des talents […] A quoi servent des bureaux ? A se réunir, mais s’il n’y a pas d’obligation, le télétravail peut être envisagé, pas imposé. Nous devons trouver la granularité pour arriver au bon schéma de fonctionnement. Nous sommes aussi là pour aider nos clients à réfléchir sur ces questions », nous a confié Alexandre Pachulski, Chief Product Officer de Talentsoft.

Chez Talentsoft à Boulogne-Billancourt, de courtes pauses sont encouragées avant de reprendre du service.

« Avec l’explosion des freelances, on tend vers l’érosion du salariat ». Voilà pourquoi Talentsoft propose de gérer ces ressources externes au sein de sa plate-forme. « Tout le monde peut être connecté à une plate-forme ouverte qui fait office d’élément fédérateur pour fournir le même niveau d’information aux collaborateurs ». Et au passage, l’éditeur peut étendre son nombre de licences et au final sa facturation. « Nous sous-traitons par exemple l’accueil et le standard, mais nous essayons de les intégrer à l’entreprise ». Le message ne passe toutefois pas encore partout. Au Crédit Agricole, les prestataires extérieurs, consultants et autres, ne sont pas connectés à la plate-forme de TalentSoft. « En France, le mouvement n’est pas naturel. L’accueil est meilleur dans les pays nordiques, culturellement plus ouverts ».

Des recrutements multidirectionnels

Si l’e-learning est aujourd’hui bien ancré chez Talentsoft depuis le rachat du nantais e-doceo, rebaptisé Talentsoft Learning, l’éditeur fonde également de grands espoirs sur le sourcing des collaborateurs. Le recrutement de certains talents est toujours un point épineux dans les entreprises, alors pourquoi ne pas institutionnaliser la cooptation. « Afin de réduire les coûts, nous proposons de confier les recrutements à toute la société et pas seulement aux recruteurs RH. Il ne s’agit pas de remplacer la RH mais de l’enrichir avec l’apport de collaborateurs membres de l’écosystème et capables d’entrer en interaction avec des candidats potentiels », a relevé A. Pachulski.

Selon ses dirigeants, le module le plus utilisé de Talentsoft est aujourd’hui MonTalentsoft, la plate-forme digitale RH, en Hollande, en France, aux USA et en Israël. Mais les solutions de cooptation et la formation sont également des best-sellers. Et pour aider ses clients et ses prospects à mieux comprendre les besoins et les ambitions de leurs collaborateurs, les équipes de l'éditeur français ont pondu une étude sur les douze tendances RH pour l’année 2017. Je vous laisse la découvrir sur le blog de l’entreprise. Et dans un prochain sujet, nous reviendrons sur notre entretien avec Joël Bentolila, CTO de Talentsoft.