Après les Etats-Unis, ce sont désormais les Pays-Bas qui entendent faire barrage à la Chine. Le gouvernement néerlandais devrait ainsi instaurer des restrictions sur les exportations vers la Chine de technologies avancées nécessaires à la fabrication de puces, ce qui devraient notamment affecter la confection de composants avancés et des modules mémoires (DRAM). Bien qu'à l'étude depuis un certain temps, le gouvernement néerlandais vient tout juste de publier de plus amples informations concernant ces restrictions. « Ces nouveaux contrôles à l'exportation se concentrent sur les technologies avancées nécessaires à la fabrication de puces, y compris les outils de gravure et de lithographie en immersion les plus sophistiqués », précise dans un communiqué la société ASML. Basé à Veldhoven aux Pays-Bas, l'entreprise est spécialisée dans la fabrication de machines de photolithographie (laser ultraviolet) pour les équipements de gravure et donc la fabrication de puces.

Des restrictions qui rappellent celle instaurées par le gouvernement de Joe Biden depuis octobre 2022. En effet, face à l'escalade des tensions géopolitiques entre les États-Unis et la Chine, l'administration du président américain a mis en place des contrôles sur les exportations de technologie des semi-conducteurs vers son principal rival. L'objectif étant de freiner le développement de technologies de pointe qui pourraient, selon les américains, être utilisées pour la modernisation militaire et comme outils de violations des droits de l'Homme. Les États-Unis ont également fait pression sur leurs alliés mondiaux pour qu'ils fassent de même. Une stratégie qui semble avoir fonctionné auprès des Pays-Bas.

Les contrôles à l'exportation menacent la supply chain mondiale

La guerre des puces entre les deux superpuissances menace aujourd'hui les entreprises mondiales qui sont prises entre deux feux. La perturbation de la chaîne d'approvisionnement des semi-conducteurs risque en effet d'affecter un large éventail de technologies et de biens de consommation.

Dans une déclaration publiée mercredi, la ministre du Commerce néerlandaise, Liesje Schreinemacher, a indiqué que les restrictions aux exportations auraient un impact sur « des technologies très spécifiques dans le cycle de production des semi-conducteurs », rapporte la BBC. « Les Pays-Bas considèrent qu'il est nécessaire, pour des raisons de sécurité nationale et internationale, que cette technologie soit contrôlée dès que possible », a-t-elle déclaré. Sans nommer la Chine ou ASML, Mme Schreinemacher a indiqué que le gouvernement néerlandais avait pris en compte « les évolutions technologiques et le contexte géopolitique » lors de l'élaboration de ces restrictions.

Parallèlement, ASML a déclaré que les contrôles à l'exportation l'obligeront à demander des licences pour être autorisé à exporter les plus sophistiquées de ses machines de gravure par laser ultraviolet. « Il est important de notifier que les contrôles supplémentaires à l'exportation ne concernent pas tous les outils de lithographie en immersion, mais seulement ceux qualifiés de « plus avancé »». Bien que le fabricant n'ait pas reçu d'informations supplémentaires sur l'implication exacte de ce terme, il suppose qu'il vise ses technologies « en immersion critique », à savoir les plus développées, telles que le Twinscan NXT:2000i et les systèmes du même type qui ont suivi.

En effet, le Twinscan NXT:2000i fournirait selon le Hollandais des capacités supérieures pour la fabrication en grand volume de circuits avancés et de DRAM. Destinés aux serveurs, ils sont conçus pour traiter de gros volumes de données et effectuer des opérations complexes. Toutefois, l'entreprise a déclaré qu'elle « ne s'attend pas à ce que ces mesures aient un effet important sur ses perspectives financières 2023 ni à plus long terme ».

Les États-Unis font pression sur leurs alliés

Dans le cadre d'une guerre commerciale plus large avec la Chine, les États-Unis ont convaincu il y a quelques mois les Pays-Bas et le Japon de se joindre à eux pour interdire les transferts de certains équipements DUV. Si ASML est un fabricant néerlandais majeur de cette technologie, le Japon abrite de son côté Canon, Nikon et Tokyo Electron. Résultat, ces deux pays sont devenus des éléments clés du plan américain visant à saper la domination de la Chine sur le marché des composants.

De son côté, afin de réduire sa dépendance à l'égard des autres pays, la Chine investit pour stimuler son industrie nationale de semi-conducteurs. Ainsi, 1,9 Md$ devrait être injecté dans Yangtze Memory Technologies (YMTC), le plus grand producteur de puces mémoire du pays. L'ampleur de l'investissement témoigne des efforts déployés par le gouvernement chinois pour relancer son industrie des puces électroniques et faire face aux contraintes imposées par les États-Unis et leurs alliés.